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Brexit et fiscalité des entreprises

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En l’absence de ratification de l’accord de retrait par le Royaume-Uni au moment de sa sortie de l’Union Européenne, plusieurs changements importants en fiscalité des entreprises sont à anticiper notamment concernant l’éligibilité au crédit d’impôt recherche, les relations intra-groupe et également en matière de TVA après la sortie du Royaume-Uni de l’Union Européenne.

1. Crédit d’impôt recherche et organisme de recherche britannique agréé

Les opérations de recherche réalisées directement par les entreprises françaises dans un autre État de l’Union Européenne (UE) ou dans un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen (EEE) ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales sont éligibles au crédit d’impôt recherche (CIR), à condition toutefois qu’elles ne se rattachent pas à l’exploitation d’un établissement stable [1].

Par conséquent en l’absence de ratification de l’accord général de sortie, ces dépenses engagées au Royaume-Uni ne seront plus localisées au sein de l’UE ni de l’EEE et donc ne seront plus éligibles au crédit d’impôt en faveur de la recherche.

2. Les conséquences du Brexit sur les relations intra-groupe

2.1. Sortie du périmètre de l’intégration fiscale

Certaines sociétés ne pourront plus bénéficier du régime français de l’intégration fiscale qui permet aux sociétés d’un même groupe de compenser leurs résultats fiscaux individuels au niveau du résultat fiscal d’ensemble du groupe.

Sans ratification de l’accord général de sortie, les sociétés britanniques sortiront du périmètre de l’intégration fiscale à compter de la sortie du Royaume-Uni de l’UE. En conséquence, les filiales françaises des sociétés résidentes du Royaume-Uni sortiront également du périmètre de l’intégration fiscale.

Lorsque la société britannique est la société mère du groupe, le groupe fiscal français prendra fin dans son ensemble.

La loi de finances pour 2019 prévoit certaines mesures visant à limiter les impacts du Brexit pour les groupes intégrés. Les sociétés mères non résidentes et les sociétés intermédiaires seront réputées remplir les conditions d’éligibilité du régime d’intégration fiscale jusqu’à la clôture de l’exercice au cours duquel le retrait du Royaume-Uni de l’UE doit intervenir.

2.2. Taux de retenue à la source appliqué aux dividendes versés au sein d’un groupe

Les dividendes perçus par une société membre d’un groupe intégré, d’une « société européenne » c’est-à-dire située dans l’UE ou dans l’EEE qui, si elle était établie en France, remplirait les conditions pour être membre du même groupe sont exonérés d’impôt sur les sociétés sous réserve de l’imposition d’une quote-part de frais et charges égale à 1 % du montant des distributions dans la situation où ces distributions ouvrent droit au régime mère-fille. Depuis la Loi de finances de 2019, si les distributions n’ouvrent pas droit au régime mère-fille, alors elles peuvent être retranchées du résultat à hauteur de 99 % de leur montant. Les dividendes seront donc également pris en compte dans le résultat du groupe à hauteur de 1 %.

Le retrait du Royaume-Uni de l’UE et de l’accord sur l’EEE entraînera la perte immédiate de la qualité de société européenne de la société distributrice. Les produits concernés seront donc imposables en France à hauteur de 5 % de leur montant si les conditions du régime mère-fille sont satisfaites, et pour l’intégralité de leur montant dans les autres cas.

L’administration fiscale a publié un rescrit précisant le traitement des dividendes versés par une société établie au Royaume-Uni au cours de l’exercice de retrait de l’UE . Les produits perçus à raison de participations dans de telles sociétés seront réputées provenir de sociétés établies dans l’UE jusqu’à la clôture, par la société française de la distribution, de l’exercice en cours lors du retrait du Royaume-Uni [2].

Concernant les dividendes distribués par des filiales françaises à leurs sociétés mères britanniques en l’absence de ratification de l’accord général de sortie, les sociétés britanniques ne pourront plus bénéficier du régime mère-fille et de l’exonération de retenue à la source sur les dividendes de source française.

En application de la convention fiscale entre la France et le Royaume-Uni du 19 juin 2008, les dividendes versés par une société française à une société britannique qui détient, directement ou indirectement, moins de 10 % du capital, feront l’objet d’une retenue à la source au taux de 15 %.

3. Impacts du Brexit pour les contribuables assujettis à la TVA

3.1. Déclarations spécifiques relatives aux importations et exportations

En l’absence de ratification de l’accord général de sortie, le Royaume-Uni sera traité comme un pays tiers à l’UE et le système européen harmonisé de TVA ne sera plus applicable. Ainsi, les opérations réalisées avec le Royaume-Uni ne seront plus considérées comme des acquisitions ou livraisons intracommunautaires, mais comme des importations et exportations à destination d’un Etat tiers à l’UE. Les entreprises françaises qui réalisent des opérations soumises à la TVA avec le Royaume-Uni devront déclarer et payer la TVA due au Royaume-Uni auprès des autorités britanniques. Les modalités et les formalités à accomplir relèvent de la seule compétence de l’administration fiscale britannique.

Pour les entreprises britanniques il n’y aura pas de changement de leur numéro de TVA français. Si ces entreprises ne réalisent plus d’opérations imposables en France nécessitant le maintien de ce numéro, elles doivent en informer le service des impôts des entreprises étrangères de la Direction des impôts des non-résidents pour que le numéro soit invalidé.

Il ne sera plus possible de vérifier la validité d’un numéro de TVA britannique sur le site VIES de la Commission européenne [3] . A la différence des opérations intracommunautaires les opérations d’importation et d’exportation nécessitent le dépôt de déclarations spécifiques auprès de l’administration des douanes et droits indirects au moment de l’importation ou de l’exportation des biens [4].

3.2. Demande de remboursement de TVA

  • Remboursement de la TVA française : la désignation d’un représentant fiscal

En l’absence de ratification de l’accord général de sortie, une entreprise britannique pourra toujours demander le remboursement de TVA déductible, auprès du service de remboursement de la TVA de la Direction des impôts des non-résidents.
En revanche, la procédure de remboursement TVA est différente. En effet, la TVA afférente aux biens et aux services acquis en France pour les besoins de son activité économique par un assujetti établi dans un autre État membre de l’UE peut, sous certaines conditions et selon certaines modalités, faire l’objet d’un remboursement.

A l’issue de la sortie du Royaume-Uni de l’UE, la société britannique relèvera des dispositions de la treizième directive 86/560/CEE du Conseil des Communautés européennes du 17 novembre 1986 [5] qui accorde aux assujettis établis dans un pays situé hors de l’UE un remboursement de TVA selon des modalités déclaratives différentes de celles accordées aux assujettis de l’UE. Au même titre que les remboursements pour des assujettis établis dans l’UE, le remboursement est subordonné à des conditions tenant à la situation des assujettis (ils n’ont pas eu en France le siège de leur activité économique ou un établissement stable à partir duquel les opérations ont été effectuées ou, à défaut, leur domicile ou leur résidence habituelle) et aux opérations réalisées (ils n’ont pas effectué de livraisons de biens ou prestations de services situées en France). Le remboursement se fait par l’intermédiaire d’un portail électronique dans chaque État membre[6]. Les assujettis établis hors de l’UE ont l’obligation de désigner un représentant fiscal assujetti à la TVA et établi en France qui remplit en leurs lieu et place les formalités nécessaires pour obtenir le remboursement. Le représentant fiscal souscrit un engagement écrit de reverser la TVA à la place de l’assujetti redevable dans le cas où ce dernier ne remplirait pas effectivement les conditions exigées pour bénéficier des restitutions demandées.

  • Remboursement de la TVA britannique

En l’absence de ratification de l’accord général de sortie, les demandes de remboursement de TVA britannique peuvent être réalisées avant la date de sortie du Royaume-Uni de l’UE auprès de la DGFIP au moyen du site interne et de l’espace professionnel de l’assujetti sur le site www.impots.gouv.fr. Si la demande n’a pas pu être transférée au Royaume-Uni avant la date de sortie de l’UE, il convient de déposer la demande directement auprès de l’administration fiscale britannique, la France n’aura plus d’instrument juridique pour échanger avec cette dernière. A partir de la date de sortie du Royaume-Uni de l’UE la demande de remboursement de TVA devra s’effectuer directement auprès de l’administration fiscale britannique selon une procédure qu’elle définira.

3.3. Mini-guichet et TVA britannique

En l’absence de ratification de l’accord général de sortie, vous devrez déclarer et payer via le mini-guichet français la TVA due au Royaume-Uni sur les prestations exigibles pour chacun des trimestres qui précèdent la date de sortie du Royaume-Uni de l’UE.

La TVA se rapportant aux opérations imposables au Royaume-Uni à compter de la date de sortie du Royaume-Uni de l’UE, devra directement être déclarée et payée auprès des autorités britanniques selon les modalités fixées par le Royaume-Uni et non plus via le mini-guichet.

En effet le Royaume-Uni ne sera plus autorisé à se connecter aux systèmes informatiques de l’UE. Si vous êtes identifié pour le mini-guichet au Royaume-Uni et n’êtes pas établi dans un État membre de l’UE vous pourrez utiliser le guichet électronique mis en place pour les assujettis non établis dans l’UE et vous inscrire sur le portail d’un État membre de l’UE de votre choix. A défaut, vous devrez faire directement vos démarches auprès de chaque État membre de consommation concerné. S’agissant de la France, vous devrez vous adresser au service des impôts des entreprises étrangères de la Direction des impôts des non-résidents.

3.4. Aucune obligation de désignation d’un représentant fiscal

En l’absence de ratification de l’accord général de sortie, les entreprises britanniques n’ayant pas d’établissement stable en France n’ont pas l’obligation de désigner un représentant fiscal pour acquitter la TVA. Le service des impôts des entreprises étrangères de la Direction des impôts des non-résident sera en charge des dossiers des entreprises britanniques.

4. Prélèvement à la source et obligation de désignation d’un représentant fiscal français

En l’absence de ratification de l’accord général de sortie, les entreprises britanniques auront l’obligation de désigner un représentant fiscal en matière de prélèvement à la source. Le représentant fiscal effectuera les démarches pour le compte de l’entreprise auprès du service des impôts des entreprises étrangères de la Direction des impôts des non-résidents.

[1] BOI-BIC-RICI-10-10-20-20160706 n°1, 06/07/2016
[2] BOI-RES-000035, 06/03/2019
[3] http://ec.europa.eu/taxation_customs/vies/
[4] Article 74 de l’annexe III du CGI pour les conditions d’exonération à l’exportation ; Article 292 et 1695 du CGI pour le calcul de la taxe à l’exportation
[5] BOI-TVA-DED-50-20-30-40-20150805 n°1, 05/08/2015
[6] Article 289 D du CGI

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