De plus en plus d’élus locaux sont poursuivis et condamnés pendant leur mandature. Très souvent pour des manquements à leur devoir de probité.
Quand un élu local est-il intéressé à une question votée par son assemblée délibérante ?
Le conflit d’intérêt se définit par :
« (…) toute situation d’interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés qui est de nature à influencer ou à paraître influencer l’exercice indépendant, impartial et objectif d’une fonction »[1]
Trois critères cumulatifs permettent d’identifier l’existence du conflit d’intérêts :
- L’élu doit détenir un intérêt, direct ou indirect, privé ou public, matériel ou moral ;
- Cet intérêt doit interférer avec l’exercice de son mandat.
L’interférence peut être matérielle (l’intérêt et les décisions auxquelles participe l’élu portent sur le même domaine d’activité), géographique (l’intérêt porte sur des activités exercées dans le ressort de la collectivité à laquelle appartient l’élu) ou temporelle (l’intérêt et le mandat sont contemporains) ;
- L’interférence est telle qu’elle jette un doute sur la capacité de l’élu à exécuter son mandat de manière impartiale et en toute objectivité.
A titre d’exemple, il y a conflit d’intérêts lorsqu’un élu, ayant des liens familiaux avec le dirigeant d’une société prestataire de la Commune, a participé à la procédure de sélection[2].
Le seul lien avec une personne moral pose-t-il problème ?
Ren ne fait obstacle, en principe, à ce qu’un élu local soit lié à une personne morale exerçant son activité sur le territoire de la Commune – même si cette personne reçoit des subventions municipales.
Le législateur a, d’ailleurs, précisé qu’un élu n’avait pas un intérêt automatique, lorsque sa collectivité délibère sur une affaire intéressant une structure à laquelle il est lié, si :
- L’élu est désigné pour participer aux organes décisionnels de cette personne morale (de droit public ou privé) « en application de la loi »[3] ;
- L’élu représente sa collectivité au sein d’une Société d’économie mixte locale[4].
Dans tous les cas, des précautions doivent cependant être prises :
Les élus doivent obligatoirement s’abstenir de participer aux décisions de la Commune liées à :
- La conclusion d’un contrat, avec la personne morale au sein de laquelle l’élu a un intérêt. C’est notamment le cas, lorsque cette personne morale est attributaire d’un contrat de commande publique ;
- L’attribution d’une aide (financière ou autre) ou d’une garantie d’emprunt ;
- L’attribution d’une autorisation d’urbanisme ;
- La modification du PLU, lorsque cette modification a une incidence sur des parcelles appartenant à ladite personne morale ;
- Leur propre désignation au sein d’une personne morale.
Quels sont les risques ?
Les conséquences d’une situation de conflit d’intérêt peuvent être graves :
- L’illégalité des délibérations auxquelles ont pris part un ou plusieurs élus intéressés à l’affaire ;
- La condamnation, par les juridictions répressives :
- Des élus intéressés, qui commettent le délit de prise illégale d’intérêts[5].
Cette infraction est punie de cinq ans d’emprisonnement et d’une amende de 500 000 euros ;
- Du Maire de la Commune, qui est susceptible de commettre le délit de favoritisme.
Ce délit est constitué lorsque toute personne, exerçant les fonctions de représentant d’une collectivité territoriale, a :
« (…) procuré à autrui un avantage injustifié par un acte contraire aux dispositions législatives ou réglementaires ayant pour objet de garantir la liberté d’accès et l’égalité des candidats dans les marchés publics »[6].
Le Maire encourt le risque d’une condamnation, en concluant un contrat avec une personne morale, lorsqu’il ne pouvait ignorer l’existence d’un conflit d’intérêts – c’est-à-dire, lorsqu’il savait nécessairement qu’un élu lié à cette personne était susceptible de commettre une prise illégale d’intérêts.
Cette infraction est punie de deux ans d’emprisonnement et d’une amende de 200 000 €.
La prise d’intérêt est entendue largement par les juges :
Il y a conflit d’intérêt, dès que les objectifs poursuivis par la personne morale à laquelle un élu est lié, se dissocient des intérêts de l’ensemble des habitants de la commune.
Attention aux pièges : une condamnation par le juge administratif ou pénal est possible, même si :
- L’élu n’en retire aucun profit personnel ;
- La personne morale à laquelle il est lié est dépourvue de but lucratif ;
- L’élu siège au sein de la personne morale en tant que représentant de la collectivité ;
- Les responsabilités de l’élu au sein de la personne morale sont modestes (qu’il soit directeur, président, trésorier, membre du conseil d’administration ou même simple bénévole) ;
- La décision prise présente un intérêt pour la collectivité[7].
La prise illégale d’intérêt est une infraction formelle, qui se consomme indépendamment de toute conséquence matérielle.
Comment éviter le risque de condamnation ?
Il est impératif de s’abstenir de participer aux décisions ayant un impact quelconque sur la personne, au sein de laquelle l’élu détient un intérêt (même purement moral).
Dans ce cas, l’élu doit impérativement s’abstenir de (d’) :
- Prendre part au vote ;
- Participer aux débats et aux travaux préparatoires ;
- Assurer les fonctions de secrétaire de la séance du conseil municipal au cours de laquelle est votée la délibération ;
- Être simplement présent à toute réunion organisée en amont du vote ;
- Prenant une position officielle ou publique sur l’affaire, qui a pu influencer le vote.
L’élu doit, par ailleurs, sortir de la salle au moment des débats et du vote.
Afin d’être en mesure de prouver que la délibération a bien été adoptée hors la présence de l’élu, le procès-verbal de la séance doit noter l’heure à laquelle il a quitté la salle, ainsi que celle à laquelle il l’a réintégrée.
S’agissant de l’attribution d’un contrat de commande publique, l’élu qui détient un intérêt à cette attribution ne doit :
- Ni siéger à la commission d’appel d’offres ;
- Ni prendre part au choix de l’entreprise attributaire, notamment en participantaux débats ou au vote de la délibération approuvant le recours à cette entreprise ;
- Ni exercer une influence particulière sur la définition et la préparation des documents du marché, d’une manière qui pourrait être considérée discriminatoire (visant à favoriser la candidature de l’opérateur auquel il est lié).
Nos avocats se tiennent à votre disposition pour répondre à toutes vos questions, vous conseiller et vous accompagner. Vous pouvez prendre rendez-vous directement en ligne sur www.agn-avocats.fr.
AGN AVOCATS – Pôle Droit Administratif
contact@agn-avocats.fr
09 72 34 24 72
[1] Article 2 de la loi n°2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique.
[2] Conseil d’État, 9 mai 2012, requêten° 355756.
[3] Article L.1111-6 du Code général des collectivités territoriales.
[4] Article L.1524-5 du Code général des collectivités territoriales.
[5] Article 432-12 du Code pénal.
[6] Article 432-14 du Code pénal.
[7] Cour de cassation, 19 mars 2008, n°07-84.288.
- Abus de biens sociaux
- Abus de faiblesse
- Actualités du réseau
- AGN Football Club
- Association
- Assurance & Responsabilité
- Bail commercial
- Cession de fonds de commerce
- Contractuels de la Fonction Publique
- Contrats & Consommation
- Contrôle Urssaf
- Délais de paiement
- Diffamation
- Divorce
- Donation
- Droit administratif
- Droit Contrats & Distribution
- Droit de la famille
- Droit de la Fonction Publique
- Droit de réponse
- Droit des Affaires
- Droit des Marques
- Droit des Sociétés
- Droit du Tourisme
- Droit du Travail
- Droit du Travailleur Handicapé
- Droit Equin
- Droit Franco-Allemand
- Droit Public
- Expulsion de locataires
- Fiscalité
- Fraude fiscale
- Immobilier
- Les Quiz AGN
- Malfaçons et vices cachés
- Non classé
- Permis de construire
- Préjudice Corporel
- Propriété intellectuelle et droit du numérique
- Revue de presse AGN
- Succession
- Travailleurs étrangers
- VEFA (vente en l’état futur d’achèvement)
- Ventes immobilières et compromis