Pour mémoire, sous l’empire du précédent règlement, les interdictions ou restrictions imposées par les fournisseurs aux ventes en ligne de leurs distributeurs ont fait l’objet d’une attention particulière des autorités de la concurrence, de plusieurs arrêts de jurisprudence (dont les arrêts de la CJUE Pierre Fabre et Coty) et de nombreux débats.
Le Règlement d’exemption et les nouvelles Lignes directrices clarifient tout d’abord à la fois les restrictions aux ventes en ligne qui demeurent interdites et ne peuvent être exemptées et les exigences imposées par les fournisseurs pouvant bénéficier de celles-ci. Par ailleurs, les ventes en ligne ne nécessitant plus le même degré de protection, des assouplissements sont prévus pour certaines restrictions.
L’interdiction pour le fournisseur d’empêcher l’utilisation effective d’internet par ses distributeurs
En vertu de l’article 4, e) du Règlement d’exemption, constitue désormais une restriction caractérisée, excluant le bénéfice de l’exemption, le fait « d’empêcher l’utilisation effective de l’internet par l’acheteur ou ses clients pour vendre les biens ou services contractuels, étant donné que cela restreint le territoire sur lequel, ou la clientèle à laquelle, les biens ou services contractuels peuvent être vendus ».
Ce concept très flou d’ « utilisation effective » permettra une analyse au cas par cas des restrictions imposées par les fournisseurs.
Selon les nouvelles Lignes directrices, il s’agit tout d’abord des interdictions directes, en droit ou de facto, faites à un distributeur d’utiliser internet : obligation de ne pas vendre sur des territoires ou à une clientèle spécifiques, obligation de transmettre à d’autres distributeurs les commandes de clients, obligations ayant pour objet de réduire le volume des ventes en lignes, interdiction totale d’utiliser certains canaux de publicité en ligne (moteurs de recherche ou outils de comparaison de prix), ou encore obligations empêchant le distributeur de créer ou d’utiliser sa boutique en ligne.
Les nouvelles Lignes Directrices donnent également de nombreux exemples d’interdictions indirectes, telles que la nécessité d’obtenir l’autorisation du fournisseur pour vendre en ligne, la privation, en cas de vente en ligne, de certains avantages financiers, le refus ou la limitation de fourniture des produits, la menace de résiliation de l’accord, les exclusions de garantie, etc.
Les mesures permettant de vérifier la destination des biens fournis (étiquettes différenciées, langues spécifiques ou numéros de série, audits) ne constituent pas des restrictions per se, mais peuvent faire partie d’une restriction caractérisée lorsqu’elles sont utilisées pour contrôler la destination du bien fourni et, in fine, empêcher les ventes en ligne.
Les obligations ayant indirectement pour objet d’empêcher l’utilisation effective d’internet peuvent également porter sur :
- L’obligation de rediriger les clients situés sur un autre territoire vers un autre site ;
- L’obligation de mettre fin aux transactions lorsque les informations de la carte de crédit indiquent une adresse non située sur son territoire ;
- L’obligation de vendre uniquement dans un point de vente physique ;
- L’obligation d’obtenir l’autorisation du fournisseur avant d’effectuer des transactions individuelles en ligne ;
- L’interdiction d’utiliser les marques ou nom du fournisseur sur son propre site ;
- L’interdiction faite au distributeur d’exploiter sa propre boutique en ligne ;
- L’interdiction faite à l’acheteur d’utiliser entièrement un canal de publicité en ligne, directe ou indirecte (obligation de ne pas utiliser la marque déposée par exemple).
Le fournisseur peut cependant imposer d’autres restrictions des ventes en lignes ou des restrictions de la publicité en ligne, sous réserve que ces restrictions n’aient pas pour objet d’empêcher entièrement l’utilisation d’un canal de publicité en ligne (article 4, e) i° et ii) du Règlement d’exemption).
Le fournisseur peut ainsi imposer des exigences en matière de qualité, liées à la boutique en ligne ou à la présentation des produits, ou encore exiger l’exploitation de points de vente physiques ou d’un minimum de ventes hors ligne, en particulier dans les réseaux de distribution sélective.
Pour tenir compte de l’arrêt Coty, et mettant ainsi fin à de nombreux débats, les nouvelles Lignes directrices précisent que ce fournisseur peut interdire l’utilisation de places de marché, et, plus généralement exclure certains canaux de vente en ligne spécifiques, à condition de laisser le distributeur libre d’exploiter sa propre boutique en ligne et de faire de la publicité en ligne. Le fournisseur peut également imposer certaines restrictions de la publicité en ligne, telles que le respect de certaines normes de qualité par la publicité ou le fournisseur, l’inclusion de contenus ou d’informations spécifiques, l’absence d’utilisation de la marque du fournisseur dans le nom de domaine de la boutique en ligne, à condition que ces restrictions n’aient pas pour objet d’empêcher l’utilisateur d’utiliser entièrement un canal de publicité.
L’assouplissement de certaines règles en matière de revente en ligne.
Le 1er assouplissement tient compte du développement des ventes en ligne et permet désormais au fournisseur de pratiquer une différenciation tarifaire selon que les produits sont destinés à être revendus par les distributeurs dans leurs points de vente physiques ou en ligne (« double prix » ou « dual pricing »). Cette pratique de double prix, autrefois considérée comme une restriction caractérisée, peut désormais être exemptée si la différence de prix de gros est raisonnablement liée aux différences d’investissements et de coûts supportés par les distributeurs dans chaque canal et si elle n’a pas pour objet d’empêcher l’utilisation effective d’internet (vente en ligne rendue non viable ou non rentable, limitation de la quantité de produits destinés à être vendus en ligne) (point 209 des nouvelles Lignes Directrices). La Commission estime en effet désormais que cette possibilité de pratiquer des doubles prix peut encourager ou récompenser un niveau approprié d’investissement dans le canal de vente concerné.
Le 2ème assouplissement porte sur le principe d’équivalence entre les exigences de qualité imposées en ligne et hors ligne dans la distribution sélective. En principe, les critères qualitatifs et/ou quantitatifs sur la base desquels les distributeurs sont agréés doivent, dans un système de distribution sélective, être fixés tant pour la vente en ligne que pour la vente dans des points de vente physiques. Les nouvelles Lignes directrices prévoient désormais qu’un fournisseur peut imposer des critères différents pour les ventes en ligne par rapport à ceux appliqués aux ventes physiques, tels que la création et l’exploitation d’un service après-vente d’assistance en ligne, l’obligation de couvrir le coût de retour des produits, ou des obligations liées à la sécurité des systèmes de paiements, à condition que cette absence d’équivalence n’ait pas pour objet d’empêcher les ventes en ligne (point 235).
En conclusion, le nouveau Règlement d’exemption et les nouvelles Lignes directrices, en intégrant à la fois le retour d’expérience et la jurisprudence, offrent un guide plus complet pour auto-évaluer les exigences pouvant être imposées aux distributeurs quant à la vente de produits ou de service en ligne. L’application de la notion d’« utilisation effective » de l’internet, compte-tenu de son imprécision, ne manquera cependant pas d’alimenter de nouveaux débats, en particulier en cas de nouvelles technologies ou nouveaux outils permettant de vendre en ligne.
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