Dans le cadre d’un accident de service ou d’une maladie professionnelle, le fonctionnaire peut percevoir l’allocation temporaire d’invalidité (ATI). Elle compense l’invalidité par une somme qui s’ajoute au salaire de l’agent.
Cependant, il existe des conditions pour pouvoir y avoir droit. Dans un arrêt du 12 JUIN 2024 n°475044 publié aux tables du recueil Lebon, le Conseil d’Etat précise le régime d’application.
Pour les maladies professionnelles, elles peuvent être reconnues immédiatement si elles sont désignées au Tableau. En effet, certaines maladies sont liées directement au travail, on peut le voir pour les troubles musculo-squelettiques par exemple chez les hôtesses et hôtes de caisse.
Pourtant, certaines pathologies ne figurent pas sur ce Tableau, même si elles ont un lien avec le travail.
Si un agent considère que sa maladie est en relation avec le travail, mais hors Tableau, il doit y avoir une reconnaissance par l’employeur public.
En règle générale, le fonctionnaire dépose un dossier de maladie imputable au service auprès de son employeur par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise contre signature. L’employeur peut la reconnaître immédiatement, cependant habituellement, il mandate un expert et saisit le conseil médical. A la lecture de l’expertise, le conseil va émettre un avis et de là l’Administration prendra ou non une décision d’imputabilité. Il est à noter que si l’employeur doit prendre l’avis du conseil, ce n’est pas un avis conforme. Il peut aller contre cet avis s’il le justifie dans sa décision. Cette dernière peut être contestée devant le tribunal administratif.
Si l’imputabilité est reconnue, soit par l’employeur, soit par le tribunal, l’agent doit demander son allocation temporaire d’invalidité dans l’année qui suit. Il faut y faire attention, car cette prescription n’est pas toujours précisée et il est facile de la rater.
Dans le cadre d’une maladie professionnelle hors Tableau, le taux d’IPP doit être supérieur à 25%, à défaut l’imputabilité n’est pas reconnue et donc l’ATI n’est pas acquise.
Le Conseil d’Etat a encore précisé cette règle des 25% et donc son application à une demande d’allocation :
- 6. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que le bénéfice d’une allocation temporaire d’invalidité, au titre d’une invalidité résultant de maladies ne figurant pas sur les tableaux de maladies professionnelles annexés au code de la sécurité sociale, n’est pas subordonné à un taux minimum d’incapacité global dont serait affecté le demandeur, mais à la reconnaissance de l’origine professionnelle de l’une au moins de ces maladies, laquelle doit, en application de l’article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, avoir provoqué un taux d’incapacité permanente d’au moins 25 %, ce taux étant déterminé par application du barème indicatif mentionné à l’article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite.
- 7. Pour reconnaître à M. A… le droit au bénéfice d’une allocation temporaire d’invalidité à raison d’une invalidité résultant de deux maladies qui ne figuraient pas sur les tableaux des maladies professionnelles annexés au code de la sécurité sociale, le tribunal administratif s’est fondé sur ce que la somme des taux d’incapacité permanente résultant de l’une et de l’autre excédait 25 %. En statuant ainsi, alors qu’il était constant devant lui qu’aucune de ces deux maladies n’avait provoqué, à elle seule, un taux d’incapacité permanente d’au moins 25 %, de sorte qu’elle ne pouvait être regardée comme étant d’origine professionnelle, le tribunal administratif a commis une erreur de droit.
En l’espèce, l’agent avançait que le cumul des taux d’IPP de ses deux pathologies liées au travail dépassait le taux de 25% et que donc il avait droit à l’ATI. Il avait été suivi par les juridictions du fond dans cette voie.
Le Conseil a cassé cette décision après un pourvoi de la Caisse des Dépôts et Consignations qui gère le versement de l’allocation.
En effet, pour l’institution, l’IPP de 25% faisant droit à l’allocation temporaire d’invalidité ne donne pas lieu à addition. Par exemple, une pathologie avec 20% et une autre avec 20% ne font pas 40%, mais deux maladies à 20%. De là il se déduit que le taux d’IPP nécessaire de 25% n’est pas dépassé, et donc le fonctionnaire n’a pas droit à l’ATI.
C’est en somme assez logique.
Les maladies de l’agent, si elles dépassent 25% en les additionnant, ne parviennent jamais pour chacune d’elle à ce chiffre. Il semblerait donc étrange qu’on donne l’allocation à un agent qui n’a aucune maladie professionnelle au sens des textes, sachant que l’ATI a pour objectif de compenser les préjudices d’une pathologie reconnue imputable au service.
Par ailleurs, par le biais de ce même arrêt, le Conseil d’Etat évoque aussi un principe procédural :
- 10. En premier lieu, il est toujours loisible à la personne intéressée, sauf à ce que des dispositions spéciales en disposent autrement, de former à l’encontre d’une décision administrative un recours gracieux devant l’auteur de cet acte et de ne former un recours contentieux que lorsque le recours gracieux a été rejeté. L’exercice du recours gracieux n’ayant d’autre objet que d’inviter l’auteur de la décision à reconsidérer sa position, un recours contentieux consécutif au rejet d’un recours gracieux doit nécessairement être regardé comme étant dirigé, non pas tant contre le rejet du recours gracieux dont les vices propres ne peuvent être utilement contestés, que contre la décision initialement prise par l’autorité administrative. Il appartient, en conséquence, au juge administratif, s’il est saisi dans le délai de recours contentieux qui a recommencé de courir à compter de la notification du rejet du recours gracieux, de conclusions dirigées formellement contre le seul rejet du recours gracieux, d’interpréter les conclusions qui lui sont soumises comme étant aussi dirigées contre la décision administrative initiale.
- 11. Il résulte de ce qui précède, d’une part, que les conclusions du recours de M. A… dirigées contre la décision du 10 mars 2020 du directeur des retraites et de la solidarité de la Caisse des dépôts et consignations rejetant son recours gracieux doivent être regardées comme dirigées contre la décision du 17 février 2020 de la même autorité lui refusant le bénéfice de l’allocation temporaire d’invalidité et, d’autre part, que M. A… ne peut utilement se prévaloir de l’incompétence de l’auteur de la décision du 10 mars 2020.
De manière habituelle, le citoyen peut attaquer une décision administrative de deux manières : directement devant le tribunal administratif ou par un recours gracieux. Ce dernier peut être utile et permet quelques fois d’éviter un contentieux judiciaire.
Après un refus implicite ou explicite, l’usager a deux mois pour attaquer la décision devant le tribunal.
Le Conseil précise ici que c’est bien la décision initiale, celle qui a donné lieu au recours, et non le recours gracieux qui est attaqué devant les juridictions.
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