Dans une décision rendue le 14 avril 2020, le Tribunal judiciaire de Nanterre a considéré qu’Amazon France n’aurait pas pris les mesures nécessaires pour protéger la santé de ses salariés dans le contexte actuel de crise sanitaire. Amazon France a alors annoncé la fermeture de ses entrepôts en France pour une durée minimale de 5 jours.
COVID 19 et sécurité des salariés – Les enseignements de l’ordonnance de référé ayant contraint Amazon France à fermer ses entrepôts
Dans une ordonnance de référé rendue le 14 avril 2020, le Tribunal judiciaire de Nanterre ordonnait à la société Amazon France Logistique de restreindre l’activité de ses entrepôts aux activités liées au traitement des commandes alimentaires, de produits d’hygiène et médicaux, sous astreinte d’un million d’euros par jour de retard et infraction constatée, tant qu’elle n’aurait pas procédé à l’évaluation des risques professionnels inhérents au Covid-19 et mis en œuvre les mesures nécessaires afin de protéger la santé de ses salariés.
En réponse à cette décision, Amazon a intégralement fermé l’ensemble de ses entrepôts en France pour une durée minimum de 5 jours, en indiquant n’avoir pas d’autre alternative afin de se conformer à la décision du Tribunal judiciaire de Nanterre.
Quels enseignements à tirer de cette décision pour les employeurs en France ?
Le contexte du contentieux
Dans cette affaire, des salariés d’Amazon avaient fait valoir leur droit de retrait, considérant que les mesures prises par la société n’étaient pas suffisantes pour les protéger. Des salariés ont déposé des requêtes devant les juridictions prud’homales en vue d’obtenir la reconnaissance de la validité de leur droit de retrait.
En parallèle, les services d’inspection du travail adressaient des mises en demeure à Amazon, l’enjoignant à mettre en œuvre les mesures de prévention et protection des salariés adéquates.
L’Union syndicale Solidaires a assigné la société Amazon France Logistique devant le Tribunal judiciaire de Nanterre statuant en référé, aux fins de voir ordonner à Amazon l’arrêt de l’activité des entrepôts au motif que les mesures mises en place au titre de la prévention liée au Covid-19 ne seraient pas de nature à protéger la santé des salariés.
Mesures mises en œuvre par Amazon
Il ressort de la décision du Tribunal judiciaire de Nanterre qu’Amazon France avait invoqué la mise en œuvre des mesures suivantes au titre de la prévention des risques liés au Covid-19 :
- Trois évaluations complètes par jour ;
- Modification de l’organisation du travail ;
- Document d’évaluation des risques professionnels de chaque site mis à jour au moins une fois par semaine ;
- Identification de 35 risques ;
- Documents d’évaluation des risques mis à la disposition des membres du Comité social et économique (CSE) ;
- CSE informé de l’intégralité des mesures mises en œuvre ;
- Visites de sites avec les représentants du personnel ;
- Organisation d’une réunion de négociation avec les organisations syndicales, le 19 mars 2020, portant sur les mesures mises en œuvre dans le cadre de la gestion de la crise ;
- Emission d’un « Plan d’action relatif aux conditions de protection durant l’épidémie de Coronavirus » ;
- Mise en place d’audits quotidiens sur le respect des règles en vigueur par le biais de son équipe de sécurité
Comment le TJ de Nanterre justifie sa décision
Dans sa décision, le Tribunal judiciaire de Nanterre relève notamment qu’Amazon France :
- n’a pas été en mesure de produire les procès-verbaux des réunions qui auraient été tenues avec le CSE, ni les comptes-rendus des visites et audits qu’elle indiquait avoir effectués ;
- n’a pas procédé à une évaluation suffisante du risque de contamination lié aux portiques tournants empruntés par les salariés à l’entrée de tous les sites ;
- n’a pas procédé à une évaluation suffisante du risque de contamination s’agissant de l’utilisation des vestiaires ;
- n’a pas justifié de l’intégralité des plans de prévention avec toutes les entreprises extérieures ;
- n’a pas justifié avec suffisamment de précision des protocoles mis en place concernant la fréquence des nettoyages, même s’il ressort des pièces que leur fréquence avait été augmentée ;
- n’a pas associé les représentants du personnel aux modifications de l’organisation du travail, n’a pas formalisé les nouveaux process, et ne les a pas portés à la connaissance des salariés de manière appropriée ;
- n’a pas suffisamment évalué les risques liés à la manipulation des colis qui passent de main en main ;
- n’a pas assuré une effectivité suffisante des mesures de distanciation sociale ;
- n’a pas mis en place de mesures de formation suffisantes et adaptées à destination du personnel;
- n’a pas évalué les risques psychosociaux.
Enseignements à tirer de la décision
Il semble ressortir de l’ordonnance du Tribunal judiciaire de Nanterre qu’au-delà du fait que les juges aient considéré qu’Amazon n’avait pas procédé à une évaluation suffisamment précise des risques pour chaque situation de travail et à la mise en œuvre de mesures suffisantes, le fait que les représentants du personnel n’aient pas été « associés » à l’évaluation des risques puis à la définition des mesures nécessaires pour assurer la sécurité des salariés ait particulièrement pesé dans la lourde condamnation d’Amazon France.
Au vu de cette décision, nous recommandons dès lors aux employeurs de procéder à une évaluation des risques extrêmement détaillée, puis à la définition des mesures de sécurité, tout en associant pleinement les représentants du personnel à chaque étape.
Au-delà de la consultation des représentants du personnel, nos avocats conseillent notamment de :
- Obtenir des avis favorables dans le cadre des consultations des instances représentatives du personnel (IRP) ;
- Multiplier les réunions avec les IRP (une réunion hebdomadaire de suivi nous semble être le minimum conseillé) ;
- Les associer à la détermination des conditions de travail et à la mise en place des gestes barrières.
Les risques liés à l’absence de mesures de protection suffisantes
Au-delà du risque de saisine du Tribunal judiciaire en la forme des référés en vue d’obtenir la fermeture de l’établissement, l’employeur n’ayant pas strictement respecté les procédures de mise en place des règles de sécurité s’expose à l’exercice du droit de retrait de la part de ses salariés.
Par ailleurs, un salarié ayant été infecté par le Covid-19 pourrait être amené à engager, a posteriori, une action à l’encontre de son employeur au titre de la violation de l’obligation de sécurité par ce dernier. L’issue d’une telle action semble toutefois incertaine compte tenu de la difficulté évidente pour le salarié de démontrer qu’il aurait été infecté sur son lieu de travail.
Nos avocats sont mobilisés pour vous accompagner. Si vous avez la moindre interrogation, n’hésitez pas à contacter nos avocats qui pourront vous conseiller en urgence. Vous pouvez également prendre un RDV en visio-conférence directement en ligne sur www.agn-avocats.fr.
AGN AVOCATS – Pôle Droit du Travail
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