Le legs, acte par lequel une personne dispose, à son décès, à titre gratuit de tout ou partie de ses biens ou de ses droits au profit d’une autre personne, peut contenir une ou plusieurs conditions posées par le défunt.
On dit alors que le legs est « grevé » ou « affecté » d’une ou plusieurs charges successorales.
La charge manifeste l’exigence du testateur, qui a indiqué dans son testament qu’il souhaite que les biens qu’il lègue soient utilisés comme il l’entend.
Le légataire ne peut donc pas disposer librement de l’objet du legs, mais doit respecter la volonté du testateur.
La charge peut consister en une obligation de faire : par exemple, l’obligation pour le bénéficiaire d’affecter la somme d’argent léguée à certaines dépenses choisies par le défunt.
Elle peut aussi consister en une interdiction : par exemple, l’interdiction de vendre une maison léguée durant un certain temps.
Parfois, il n’est pas aisé d’interpréter les dispositions testamentaires du défunt, et d’identifier si elles contiennent une véritable charge successorale, ou un simple souhait du testateur.
Par ailleurs, si une charge est identifiée, le légataire peut se heurter à certaines difficultés, qui le feront douter de l’opportunité d’accepter le legs.
Analysons ensemble les principales particularités du legs affecté d’une charge successorale, et les difficultés majeures qui peuvent intervenir lorsque le bénéficiaire envisage d’accepter un legs affecté d’une telle charge.
Comment savoir si un legs est affecté d’une charge ?
Le caractère de charge successorale d’un legs ressort du contenu des dispositions testamentaires.
Il pourrait sembler aisé d’apprécier si le défunt a posé une véritable condition à l’utilisation des biens qu’il a décidé de léguer.
Pourtant, il faut rester attentif aux termes choisis par le défunt lors de la rédaction de son testament : en effet, selon les termes employés, le legs pourra être considéré comme affecté d’une charge ou non.
Pour que le legs soit considéré comme affecté d’une charge, il faut que le rédacteur l’ait expressément indiqué dans son testament, ou que cette charge ressorte clairement de la volonté du testateur.
A contrario, si ce dernier manifeste un simple vœu ou souhait, sans poser de réelle condition déterminante de son consentement, le legs n’est pas considéré comme affecté d’une charge.
Par exemple, le testament par lequel le défunt précise : « J’émets le souhait que le Département utilise ma propriété pour en faire une maison de séjour de vacances ou de sport à l’usage des enfants », contient un simple vœu, et non une condition impérative affectant le legs.
En revanche, les dispositions testamentaires par lesquelles le défunt indique que : « Je lègue à mon fils l’usufruit durant sa vie de ma maison, à charge pour lui de loger ses quatre frères handicapés » constituent un véritable legs avec charge.
Dans ce dernier cas, le caractère de charge est incontestable, puisque le testateur la qualifie expressément comme telle, et on comprend bien que cette charge est déterminante du legs : sans le respect de cette condition, il paraît clair que le défunt n’aurait pas consenti à léguer sa maison.
Que faire si la charge apparaît trop difficile, voire impossible à respecter ?
Le testateur peut avoir imposé une charge qu’il est impossible pour le légataire de respecter, ou qui est devenue trop difficile à réaliser.
Comment réagir si la condition posée par le testateur est matériellement irréalisable, ou qu’elle est réalisable, mais à des conditions trop difficiles ?
Lorsqu’une charge est impossible à réaliser, la loi la répute non écrite.
Le bénéficiaire peut donc être autorisé à user librement du legs, mais peut aussi se voir refuser l’acceptation du bien légué, qui revient dans la succession.
Par exemple, il a été jugé que la charge contenue dans un testament, dans lequel le testateur lègue une somme de 150.000,00 €, à condition qu’elle soit affectée à l’édition du livre qu’il a commencé à écrire, mais qu’il n’a pas eu le temps d’achever avant son décès, est impossible à réaliser.
Lorsqu’une charge, qui était réalisable au jour du legs, est devenue trop difficile à exécuter, le légataire peut demander à ce que la réalisation de la charge soit révisée.
A nouveau à titre d’exemple, il a pu être jugé que le legs d’immeubles à un hospice communal à charge d’établir, à perpétuité, dans ces immeubles, une annexe destinée aux vieillards, comportait une condition devenue trop difficile à réaliser : de nouvelles normes obligeaient l’hospice à déménager au sein d’un nouvel établissement réaménagé, et les immeubles légués ne pouvaient pas, même en réalisant des travaux, être compatibles avec ces nouvelles normes.
Il est nécessaire d’être particulièrement prudent lors de l’acceptation d’un legs avec charge, car le légataire peut s’exposer à une action en révocation de la part d’héritiers ou d’autres légataires, qui pourraient avoir intérêt à s’opposer à l’acceptation du legs.
Ils peuvent ainsi assigner le légataire et saisir le Tribunal pour, notamment, solliciter la restitution du bien légué, dans l’état où il se trouvait au jour du legs, ainsi que la restitution des fruits éventuellement perçus (loyers, …).
Il est donc indispensable de se faire assister en cas de difficultés d’interprétation du testament.
Comment se prémunir contre des difficultés d’interprétation des charges figurant au sein des dispositions testamentaires ?
Dans un premier temps, le légataire peut prendre attache avec les héritiers du défunt, afin se discuter ensemble de l’interprétation du testament.
En cas d’accord entre les parties, qui peuvent par exemple déterminer qu’une disposition du testament est un simple vœu et non une charge, un procès-verbal d’acte interprétatif pourra être régularisé. Un tel acte permet de se prémunir contre une potentielle action judiciaire des héritiers.
Également, toujours pour se prémunir contre des difficultés d’interprétation des dispositions testamentaires, et anticiper une éventuelle réclamation des héritiers, la loi a mis en place une procédure, dite procédure de révision de charges.
L’objet de cette action est de solliciter les tribunaux, afin qu’ils puissent interpréter les dispositions testamentaires, et qu’ils se prononcent sur la possibilité d’exécution, par le légataire, de la charge affectant le legs.
Cette action peut être exercée dans un délai de 10 ans à compter du décès du testateur.
L’objectif, pour le légataire, peut être d’obtenir la réduction, voire la suppression de la charge, et d’être autorisé à disposer librement des biens légués.
Il est toutefois important de savoir que les tribunaux ont un pouvoir souverain d’appréciation en la matière, et qu’ils disposent de pouvoirs très larges de modification et d’adaptation de l’objet du legs, ou de la charge affectant le legs.
Ainsi, ils peuvent aussi : modifier l’objet du legs en s’inspirant de la volonté du défunt, réduire le champ des biens légués, transformer la charge affectant le legs, …
Il convient donc de rester vigilant pour le bénéficiaire, avant de prendre sa décision d’accepter ou non le legs, et il peut être judicieux de prendre conseil afin d’interpréter les dispositions testamentaires du défunt, et d’évaluer les éventuels risques engendrés par cette décision.
Nos avocats experts en succession, se tiennent à votre disposition pour répondre à toutes vos questions et vous conseiller. Nos entretiens peuvent se tenir en présentiel ou en visio-conférence. Vous pouvez prendre rendez-vous directement en ligne sur www.agn-avocats.fr.
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